SOMMAIRE


LÉGENDE DES APPRÉCIATIONS SUR LES OEUVRES


- : peu intéressant

* : assez bon

** : bon

*** : excellent

**** : exceptionnel


Exemple pour une oeuvre en plusieurs mouvements :

Concerto (*/*/-/*)

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SMETANA Bedrich (1824-1884)


ORCHESTRE

Ma vlast 1874   

Ma Vlast: une grande œuvre assurément. Des trous, bien sûr, dans cet ensemble imposant de 6 mouvements d'une durée avoisinant 75 minutes. Ce qui me fascine: la radicalité du langage symphonique allié à un style parfois abrupt, très ramassé, d'une rudesse presque spartiate. Radicalité car il ne subsiste dans cette trame thématique très wagnérienne (en réalité issue de la musique nordique) aucune concession à l'ancien langage italo-germanique, encore à cette époque présent dans un grand nombre d'œuvres. Et chez Wagner lui-même. Rarement le créateur de Tannhäuser s'affranchira de la présence de thèmes viennois issus de l'ancienne esthétique (le second thème de Tannhäuser justement). Radicalité chez Smetana en rapport avec le mouvement panslaviste dont le compositeur tchèque fut un chantre historique. Radicalité non pas sans doute parce que Smetana voulait avoir absolument la peau de la vieille esthétique italo-germanique - du moins ce qu'il en restait vers 1870 - mais par une expression naturelle de son tempérament profond. Rhapsodisme omniprésent, notamment dans la 4ème partie Par les prés et bois bohémiens, rhapsodisme cependant moins prégnant, moins spécifique, moins caractéristique que le rhapsodisme russe, ou même hongrois ou encore polonais. Dans ce mouvement, un thème fait exception, un thème qui atteint le paroxysme de l'intensité musicale (pour moi du moins), un thème qui saisit comme une fulguration, un thème qui exprime puissamment la profondeur de ce sentiment slave, mais est-ce un thème tchèque? N'est-ce pas un thème russe, du moins de coloration russe, intercalé dans la trame des autres thèmes typiquement tchèques. Je ne sais, je n'affirme rien. Laissons l'œuvre à son mystère, dépassons une typologie folklorique trop restrictive et stérile. La profondeur du sentiment nationaliste atteint ici une dimension mystique, et le terme de nationalisme apparaît bien pauvre pour exprimer cette plénitude, ou alors il faudrait le débarrasser de sa connotation politique. Par les prés et bois bohémiens, radicalité oui, rudesse, rusticité, dans cette succession de motifs sans transition. On retrouve la même densité, plus massive encore, plus dépouillée, dans Vysehrad. Mais il faut bien évoquer les trous dans ce testament musical grandiose, précisément dans la partie la plus connue Vltava ou Moldau. Oui, le thème principal est sublime, mais les rusalkas (les ondines), à mon sens, ne sont pas à la hauteur de ce beau thème fluide et puissant représentant le cours du fleuve. Les rusalkas sous le clair de lune: passage mystérieux qui aurait pu être sublime, mais qui, à mon sens, demeure enlisé dans l'inconsistance. Et surtout la finale du mouvement me paraît un déferlement instrumental quelque peu incohérent. Je n'ai toujours apprécié qu'à moitié cette célèbre Moldau et les auditions supplémentaires auxquelles je me suis livré n'ont pas modifié mon opinion. En revanche, je dois reconnaître avoir totalement reconsidéré la valeur du premier mouvement Vysehrad. Pas facile, il est vrai, de pénétrer cette œuvre déroutante, paradoxale. Et Smetana nous inflige parfois, inexplicablement, des insistances insupportables, voire des répétitions lancinantes, dans Vysehrad, mais aussi dans Sarka. On aurait souhaité un peu de liant dans cette masse symphonique parfois mal dégrossie, un peu plus de souplesse, de charme mélodique, plus d'homogénéité dans les sonorités, moins de dissonances dans les cuivres. Ma Vlast, une œuvre qui présente un mélange de caractères frustes propres au premier 19ème siècle, mais irriguée par une sève puissante. L'ensemble, à mon avis, même Blanik, sans doute moins dense thématiquement, présente suffisamment de génie pour que l'œuvre s'impose à tout mélomane dans sa totalité. Il faut aimer la musique militaire pour apprécier Wellenstein’camp (1859). Un style spartiate qui convient bien à l’orchestration de Smetana, pas toujours extrêmement raffinée, mais toujours forte, puissante, rude, parfois volontairement ou involontairement brutale (par l'emploi parfois assez abrupt des percussions à nu), profondément lyrique et mystérieuse. Une rudesse qui est une éminente qualité, mais que les esprits sensibles n’apprécieront peut-être pas toujours. Des fanfares dans cette œuvre, oui, et de magnifiques, surtout celle de la seconde partie avec un chœur de trompettes triomphales. En revanche, certaines parties, notamment le thème central au trombone paraît quelque peu empesé. Wallenstein’camp, un beau poème symphonique, oui, mais l’on attendait une composition plus accomplie pour un sujet qui convenait si admirablement à Smetana. Et c’est Richard III (1867) qui atteint l’apothéose: ici l’alliance des parties symphoniques flamboyantes et des parties feutrées, mystérieuses, est très aboutie. Smetana évite toute transition lénifiante. On plonge directement au cœur d’une substance thématique multiforme qui ne s’égare jamais dans l’inconsistance ou l’affadissement. L’originalité des effets symphoniques est maximale, toujours inattendue, ménageant des contrastes saisissants. Richard III, une réussite exceptionnelle, une constante évolution dans le sublime, sans la moindre baisse d’intensité, sans le moindre enlisement dans le fatras pseudo-thématique des développements qui gangrènent souvent de nombreuses œuvres symphoniques. Pourrait-on enfoncer un coin dans cette matière musicale si dense pour y déceler une faiblesse? Hakon Jarl (1861) obéit à la même esthétique et atteint aussi l’excellence. Post-wagnérisme: le mot qu’il ne fallait surtout pas écrire à propos de ces poèmes symphoniques, mais puisque le mot est lâché, acceptons-le, en précisant qu’un univers sépare les effets wagnériens de leur transformation, ou plutôt de leur réinvention chez Smetana. Qu’est-ce qui caractérise l’idéalisme musical smétanien, quel est le pont qui relie ces essais de poèmes symphoniques et la réalisation majeure que constitue Ma Vlast: sans doute le mystère, le mystère ineffable, une profondeur que l’on ne saurait décrypter, ni analyser, mais qu’on ressent au fond de soi, une fascination dont l’essence restera pour nous insoluble. Nationalisme, l’autre mot qu’il ne fallait surtout pas écrire à propos de Smetana, mais puisqu’il est écrit... Un terme dont nous ne pouvons pas soupçonner la dimension dans le contexte de l’époque et du lieu si l’on se réfère à son acception occidentaliste et moderne, c’est-à-dire une réduction au sens politique. Comme le mot - et l’idée - sont pauvres comparés à cette irréductible expression ancrée au fond de ces œuvres. Le reste de ces œuvres symphoniques: “The Fisherman, The peasant wooman, Prague Carnival”... À mon avis, tout cela ne vaut pas la peine d’être auditionné: des effets vraiment rudimentaires de fanfares le plus souvent.

Vysehrad (***)

Vltava (**)

Sarka (***)

Par les prés et bois bohémiens (****)

Tabor (***)

Blanik (*)

Wallenstein's Camp    (***) icone

Richard III    (****) icone

Hakon Jarl    (***) icone

The Fïshermann    (-) icone

The peasant wooman    (-) icone

Prague Carnival    (-) icone

Fanfares for Shakespeare's Richard III    (-) icone

Grand ouverture in do major    (-) icone

March of the Shekespeare Festival    (-)

Symphonie triomphale E major op 6 1853  icone   (*/-/*/*) icone

Presque rien des grandes réussites symphoniques de Smetana ne se retrouve dans cette œuvre. Sans doute une fatalité frappe ces œuvres pompeuses de célébrations officielles, depuis les musique royales de Haendel jusqu'à la Symphonie funèbre et triomphale de Berlioz, des œuvres au ton de solennité qui semblent vouée à une répétitivité sans imagination et à l'ennui. Smetana n'échappe pas à la règle. Quelques bribes de thèmes parfois peuvent nous rappeler Ma Vlast, notamment dans le 3ème mouvement, qui échappe quelque peu aux suites d'accords assénés impitoyablement du début à la fin de l'œuvre.

PIANO

Pas le meilleur Smetana dans la série des pièces pour piano (Danses tchèques séries 1 et 2, et quelques autres pièces), mais, à mon avis, quelques joyaux qui traduisent bien une tendance à l'épanchement virtuose, peu tempéré par la structure de la danse traditionnelle à laquelle se réfèrent ces œuvres. On retiendra notamment Polka II et Hulan. Un pianisme tout de même un peu rude et abrupt qu'utilise Smetana, très diatonique, peu porté à la nuance, mais plutôt aux contrastes, à la rutilance. Et sur l'ensemble, avouons-le - du moins selon mon jugement - tout de même pas mal de pièces d'un intérêt très secondaire. La marque rhapsodique, si elle est bien présente comme le suggèrent les titres, reste limitée. La différence avec les fameuses Danses slaves (et non pas tchèques, la nuance est peut-être là) de Dvorak apparaît évidente. Smetana, plus proche de l'éthique rhapsodique typiquement tchèque, c'est possible, mais cette conception y gagne-t-elle par rapport aux Danses de Dvorak précédemment citées? En revanche, l'apothéose de la virtuosité pianistique avec Macbeth, On the seashore, Souvenir de Bohême, Fantaisie concertante. Un pianisme nettement plus raffiné, plus souple, plus mature que dans les pièces précédentes. Virtuosité éblouissante voisinant avec des motifs rhapsodiques simples, un contraste saisissant, une intégration réussie. Néanmoins, un rhapsodisme tempéré qui tire plutôt sa particularité du folklore polonais, plus marqué apparememnt que le folklore tchèque. En particulier, Polka in A op 12 n°1 , Polka in E op 12 n°2 des Souvenirs de Bohème, qu'on pourrait qualifier de faussement chopiniens. Post-lisztien (pour employer un terme commode) dans sa recherche de dépassement lyrique, de luxuriance sonore, Smetana, oui. De ce point de vue, Macbeth and the witches, la Fantaisie concertante représentent un summum indépassable. Sur l'ensemble, un équilibre entre l'impact de thèmes caractérisés et les figurations virtuoses athématiques. Der Neugierige: une mélodie rhapsodique dans le médium, qui témoigne d'une grande économie de moyens. Quant à la série des Rêves ainsi que les Stammbuchbläter, Polkas et Wedding scenes, ces pièces s'apparentent souvent aux pièces rhapsodiques faciles, quoique la marque rhapsodique effective reste discrète.

Trois polkas de Salon op 7   

n°1 (**)

n°2 (*)

n°3 (-)

Trois polkas poétiques op 8   

n°1 (-)

n°2 (-)

n°3 (-)

Souvenirs de Bohème en forme de polkas op 12   

n°1 (*)

n°2 (-)

Czezh Dances 1e série 1877   

Polka I (-)

Polka II (***)

Polka IIII (*)

Polka IV (-)

Czezh Dances 2e série 1879   

Furiant (**)

Slepicka (**)

Oves (*)

Medved (-)

Cibulika (**)

Dupak 1- ()

Hulan (***)

Obkrosak (**)

Sousedska (-)

Skocna (*)

Bettina Polka 1883    (*)

The Peasant Woman polka 1879    (*)

Andante F minor 1880    (-)

Romance G minor 1881    (-)

Macbeth and the witches - 1859    (***)

Der Neugierige/Inquisitive - 1858    (***)

Ball-vision Polkia rhapsody - 1858    (***)

Bettina polka - 1859    (***)

Concert étude en C major - 1858    (*)

Souvenir de Bohême en forme de polkas op 12-13 1859   

Polka op 12 n°1 (***)

Polka op 12 n°2 (***)

Polka op 13 n°1 (-)

Polka op 13 n°2 (*)

On the seashore   

Concert étude op 17 (*)

Fantaisie concertante on czech folk songs - 1862    (****)

Rêves 1873   

Le bonheur éteint (*)

La consolation (-)

En Bohême scène champêtre (***)

Au salon (-)

Près du château (-)

La fête des paysans bohémiens (*)

Stammbuchblätter 1848   

in B flat major (-)

in B minor (-)

Toccata in B flat major (-)

in G major (*)

in G minor (*)

in B flat minor (*)

Andante in E flat major 1855    (*)

Polkas 1852   

Polkas in E major (-)

Polkas in G minor (*)

Polka in A major (*)

Polka in F minor (***)

Wedding Scenes 1849   

1 Wedding Procession (-)

2 Bridegroom and Bride (-)

Weddins festivity Dance (-)

QUATUOR

Le Quatuor n°1 de Smetana, s'impose sans doute comme un des plus saisissants du genre. L'œuvre, me semble-t-il, se révèle d'une très haute inspiration, d'une grande maturité. Son écriture, sans être harmoniquement moderne, présente des effets mélodiques très audacieux en un style à la fois concentré et lyrique. L'ensemble évolue dans une tessiture relativement grave, utilisant magistralement les quatre instruments, notamment la contrebasse par d'impressionnantes plongées dans le grave comme dans le début du 3ème mouvement ou la fin du quatrième mouvement. Le second mouvement, qui est composé de sections contrastées, contient notamment une mélodie particulièrement expressive alla Paganini au violon accompagnée par des pizzicati de la contrebasse. Le 4ème mouvement, seul, trahit, une inspiration rhapsodique. Le caractère dramatique de l'œuvre, en rapport avec le programme annoncé, semble refuser tout apitoiement de l'âme sur elle-même, mais recèle plutôt une expression abrupte, parfois brutale. Le Quatuor n°2, moins inspiré à mon avis, apparaît plus rhapsodique dans l'ensemble.

Quatuor n°1 en mi mineur de ma vie 1883    (***/***/***/****)

Quatuor n°2 en ré mineur 1883    (*/*/**/**)



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