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CHRONIQUE n° 40 - 05/2004
UNE NOUVELLE APPROCHE DE PAGANINI


Le public, qui n'a généralement pas de connaissances musicales techniques - ce qui est bien compréhensible - se trouve en position idéale, pensons-nous, pour apprécier Nicolo Paganini en dehors de tout préjugé, nous avons tenté de nous placer dans cette optique. Précisons qu'il s'agit de l'appréciation subjective du mélomane que je suis.

Toute l'œuvre de N. Paganini me paraît sous le signe d'une intensité lyrique quasi insurpassable, notamment dans les premiers mouvements des concertos, n°1, n°2, n°3, n°5. Les motifs rapides développés dans l'extrême-aigu communiquent à ces oeuvres une ivresse, un vertige sonore, un éblouissement auditif incomparable. Les longs mouvements d'amplification élaborés par le maître génois (comme dans le 3e mouvement du Concerto n°2) me paraissent atteindre en ampleur et complexité ce qui a pu être écrit de plus élevé. Très souvent, nous avons l'impression d'accéder à l'inaccessible, d'approcher l'absolu. Une force, un souffle inouï semblent traverser ces oeuvres. Les motifs lents nous paraissent en contraste empreints d'un pathétique troublant. Comme chez H. Vieuxtemps, H. Berlioz, F. Chopin ou H. Léonard (Concerto n°4), A. Bruckner (Symphonie n°4), Tchaïkovski (Concerto n°1 pour piano et orchestre, Dumka du même compositeur), il semble que l'âme s'abandonne en des accents apitoyés, empreints tour à tour d'espérance et de désespoir. À cet égard, le premier mouvement du Concerto n°5, peut-être le plus achevé, nous paraît ajouter encore un envoûtement particulier. Son troisième mouvement alla zingarese nous laisse confondu devant un tel déploiement d'idées musicales se succédant à une allure aussi étourdissante (on pense au troisième mouvement du Concerto n°4 d'H Vieuxtemps, au dernier mouvement de la suite Shéhérazade de N. Rimski-Korsakov...) L'ensemble des 6 concertos du maître, sans compter les fantaisies, nous paraissent d'une remarquable homogénéité sur le plan de la valeur, même si le Concerto n°4 (dont l'authenticité n'est d'ailleurs pas avérée) et le Concerto n°6 (en réalité le premier écrit de la série des 6 concertos) accusent, pensons-nous, une sensible baisse d'inspiration.

Comme dans toute œuvre d'envergure portée aux extrémités du génie, nous pensons que le langage musical de N. Paganini échappe à toute classification, à toute référence. Partant du mélodisme propre au début du XIXème siècle, que nous retrouvons également chez Mauro Giuliani ou Ludwig Spohr, notamment dans son Concerto n°8 (oeuvre qui nous parait admirable), N. Paganini déstructure la thématique après l'exposition des thèmes, atteignant, pensons-nous des effets que l'on pourrait qualifier d'impressionnistes et de modernes. L'utilisation étonnante de son chromatisme représente une nouveauté bien peu souvent signalée (sinon récemment par le Dictionnaire de la musique - Larousse, 2001 - sous la direction de Marc Vignal), et plus souvent accordée à d'autres compositeurs qui ont accaparé traditionnellement l'intérêt des auteurs.

Mais nous ne voulons pas ici créer une nouvelle idole de la musique, c'est la raison pour laquelle nous signalons la série des concertos d'Henri Vieuxtemps qui nous paraît également d'une qualité supérieure, avec un déploiement orchestral digne des plus grands symphonistes. Nous recommandons au lecteur le Concerto n°1, le Concerto n°2, le Concerto n°4. De même, nous ne pouvons que louer les concertos, à notre jugement, non moins admirables de Karol Lipinski, notamment le 2. Nous pouvons également recommander en matière d'œuvres violonistiques du XIXème siècle d'autres oeuvres à notre avis largement dépréciées, par exemple, les Danses espagnoles de Pablo de Sarasate, le Concerto n°1 d'Henrik Wieniawski, les concertos n°16, n° 20 et n°24 de Giovanni Battista. Viotti..., oeuvres qui furent par ailleurs presque toutes célèbres à leur époque.


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