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CHRONIQUE n° 43 - 08/2004
LES OEUVRES DE VIRTUOSITÉ PEUVENT-ELLES ÊTRE ÉVACUÉES DU RÉPERTOIRE?


On peut penser que l'électisme opéré par les Intellectuels se soit opposé dans une certaine mesure à la pratique des conservatoires. En effet, dans les classes instrumentales, il est difficile de ne jouer que des oeuvres techniquement faciles, où la virtuosité serait bannie. En second lieu, la difficulté instrumentale conserve certainement tout son prestige auprès des instrumentistes car c'est à elle qu'ils doivent de posséder, si l'on peut dire, leur qualification professionnelle, les élevant au-dessus des néophytes ou des simples amateurs de bon niveau. Ne pas aborder les oeuvres des plus grands pianistes ou violonistes-compositeurs comme F. Liszt ou N. Paganini serait, semble-t-il, avouer qu'on est dans l'incapacité de les jouer, ce qui serait sans doute dépréciant pour un instrumentiste. Il semble donc que l'on puisse difficilement évacuer les grands virtuoses-compositeurs de la pratique instrumentale, aussi bien au sein des conservatoires qu'au niveau des concerts. Le répertoire pour violon a conservé et conservera sans doute les oeuvres des grands violonistes-compositeurs comme H. Wieniawski, P. de Sarasate, J.B. Viotti ou H. Vieuxtemps, C. de Bériot... alors qu'ils sont presque toujours ignorés ou méprisés par les ouvrages d'histoire de la musique. Cependant, des instrumentistes à la technique plus faible pourraient aussi favoriser les oeuvres de moindre virtuosité, l'argument de la musicalité pouvant servir plutôt à masquer leur insuffisance, comme le remarque H. Haudibert.

À l'opposé des violonistes, des guitaristes, flûtistes, et peut-être de bien d'autres instrumentistes, qui ont conservé dans le répertoire d'enseignement des oeuvres spécifiques, les pianistes les ont au contraire, semble-t-il, beaucoup moins préservées. La tendance de la seconde moitié du 20e siècle nous paraît plutôt l'élimination du répertoire des grands pianistes-compositeurs (sauf quelques noms reconnus comme Chopin et Liszt) au profit des grands classiques qui s'étaient plutôt imposés comme symphonistes ou compositeurs d'ouvrages vocaux (L. van Beethoven, W.A. Mozart, F. Schubert...).

De multiples facteurs pourraient interagir pour expliquer ces phénomènes, les uns tendant à laminer les oeuvres de virtuosité, les autres tendant à leur émergence, sinon à leur reconnaissance. La tendance traditionaliste et intellectuelle visant à dénigrer la virtuosité pourrait être contrebalancée d'une part par les instrumentistes au sein des classes de conservatoires, d'autre part par l'intérêt que lui porte une partie du public.


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