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CHRONIQUE n° 37 - 02/2004
QUELLE EST L'IMPORTANCE RÉELLE DES VIRTUOSES-COMPOSITEURS
DANS L'ÉVOLUTION DE LA MUSIQUE?


Dans un ouvrage de 130 pages sur la musique française au XIXème siècle, F. Robert traite l'école franco-belge de violon en 8 lignes de petits caractères en annexe du chapitre II. Contrairement à bien d'autres auteurs d'histoire de la musique ou d'encyclopédies musicales qui oblitèrent totalement l'existence de cette école, cet auteur a bien voulu l'évoquer au moins brièvement. Il cite G.B. Viotti, P. Rode, P. Baillot... et nous dit à propos de cette école qu'elle est fondée davantage sur l'exécution ou l'enseignement que sur la composition proprement dite. Cette prééminence, ce souci didactique de la praxis instrumentale n'étaient-ils pas plutôt une des motivations fondamentales de l'artisan Bach. Mais, curieusement, ce qui à l'égard de l'un suscite approbation et admiration engendre désapprobation et désintérêt à l'égard des autres. Est-il réellement juste d'affirmer que l'enseignement fut la motivation principale des virtuoses-compositeurs, notamment de ceux qui parcouraient l'Europe pour se produire dans leurs propres oeuvres? Leur réputation est établie sur ces concerts, et donc en grande partie sur leurs propres oeuvres. G.B. Viotti écrivit notamment 29 concertos, P. Baillot 10 concertos, P. Rode 13 concertos. Mais ces violonistes-compositeurs n'ont pas, semble-t-il, pour les commentateurs vocation de grand compositeur. Peut-être n'y a-t-il pas eu à leur propos de perception idéologique, ils ne faisaient que de la musique, préférant sans doute remporter les suffrages des mélomanes par les qualités proprement musicales de leurs compositions en les exécutant. L'Histoire de la musique au XVIIIème et XIXème siècle a été établie, nous semble-t-il, en négligeant beaucoup l'apport des instrumentistes-compositeurs (flûtistes, violonistes, guitaristes...), sauf peut-être, et dans une certaine mesure, pour les instruments à clavier. Aucun violoniste-compositeur du XIXème siècle n'a acquis une consécration semblable à F. Chopin ou F. Liszt, qui ne jouissent pourtant pas, nous l'avons vu, d'une considération aussi élevée que J.S. Bach, L. van Beethoven ou W.A. Mozart. Même après la redécouverte d'A. Vivaldi, l'Histoire de la musique actuelle semble demeurer largement tributaire de cette première conception. Ainsi, l'on interprète le passage du style baroque au style galant, notamment, comme une évolution vers la recherche de l'expressivité, du brillant... C'est effectivement vrai, pensons-nous, si l'on se réfère à la musique de J.S. Bach ou G.F. Haendel, mais beaucoup moins si l'on considère les apports des grands violonistes-compositeurs comme A. Vivaldi, G. Tartini ou P. Locatelli. Ils ont en effet, à notre sens, développé une musique souvent plus lyrique et expressive que celle de la seconde moitié du XVIIIème siècle. Le développement de la virtuosité et les découvertes thématiques qui y sont associées pourraient avoir représenté le moteur de l'évolution musicale, même en ce qui concerne l'orchestre. Le développement d'une Histoire de la musique en prenant comme base implicite l'orchestique nous paraît d'ailleurs purement arbitraire.

Toute l'Histoire de la musique nous paraît devoir être réécrite en la considérant par genre instrumental et en donnant une part aussi importante aux instrumentistes-compositeurs des principaux instruments qu'aux classiques reconnus qui, plus souvent, se sont surtout attachés au genre symphonique.


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