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CHRONIQUE n° 55 - 08/2004
QUE POURAIT SIGNIFIER LA CONDAMNATION DE LA MUSIQUE ROMANTIQUE
PAR DE NOMBREUX AUTEURS?


Il est remarquable de constater que de nombreux auteurs de la fin du 19e et de la première moitié du 20ème siècle ont pratiqué l'éreintement de la musique romantique dans ce qu'elle possède de foncièrement romantique, c'est-à-dire l'empreinte sentimentale, l'expression du pathos. C'est ainsi que P.I. Tchaïkovski fut déconsidéré par de nombreux musicographes. Sans doute peut-on expliquer cette réaction par l'appartenance obligatoire des auteurs à la caste des Intellectuels par opposition aux sensibles. Ils semblent plus attachés à la forme qu'à la beauté musicale des thèmes, probablement parce que la forme est susceptible d'être analysée. Ils considèrent donc les oeuvres romantiques comme déficientes. Avec le romantisme et les virtuoses-compositeurs, la musique aurait échappé aux principes dans lesquels les Intellectuels avaient prétendu l'enfermer pendant la période classique. Il nous semble que la forme, même pendant cette époque classique, ne fut jamais codifiée par des principes intangibles et qu'elle n'a même jamais réellement guidé l'inspiration des compositeurs. Comme pour l'harmonie, il semble que l'analyse de la forme ait permis aux Intellectuels de ramener (faussement à notre sens) la musique à un critère compréhensible pour la raison. Toute la dialectique de la forme qui a mobilisé musicographes et compositeurs (en tant que doctrinaires de la musique plutôt que réellement en tant que compositeurs) n'est peut-être qu'une vaste dérivation purement intellectuelle qui eût peu d'influence réelle sur la composition proprement dite. Son rôle fut peut-être très secondaire dans l'évolution musicale par rapport à l'évolution de la thématique par exemple. Un Intellectuel du 19e siècle et du début du 20e siècle sera toujours beaucoup plus satisfait par une oeuvre classique que par une oeuvre romantique, par une symphonie de J. Haydn que par la Symphonie fantastique d'H. Berlioz. Mais qu'en est-il pendant la seconde moitié du 20e siècle? Aujourd'hui, la musique romantique au sens large s'est imposée, non dans ce qu'elle possède de sentiment romantique, mais sans doute par ce qu'elle recèle de profondeur philosophique (réelle ou supposée), ce qui nous ramène à un contenu idéel. Notre intellectuel sera toujours beaucoup plus satisfait par une symphonie de Mahler que par cette même Symphonie fantastique. Nous assistons à la poursuite de la récupération de la musique par les Intellectuels. Si l'on ajoute, de la part des pseudo-élites un soutien inconditionnel à l'égard des systèmes atonaux - où la recherche de structuration pure domine - on constate que la musique soutenue par l'intelligentsia demeure inféodée à l'intellectualisme. Il reste les purs mélomanes sensibles, mais ceux-là, considérés comme suspects, ne sont pas conviés dans la ronde de l'intellectualisme vainqueur qui décrète les valeurs et jette les anathèmes.


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